Je suis née dans un petit village plutôt pauvre, mais tranquille. Mes parents avaient choisis de s’isoler là-bas pour des raisons que j’ignorais, bien que je pensais que la solidarité de cet endroit en fût partie. En effet, il existait peu de bourg où leurs habitants –qui étaient tous des Hyou- s’entendaient et s’entraidaient autant. C’est donc là-bas que je naquis et que je grandis en tant que fille unique, choyée par ma famille. Mon père travaillait en tant que bûcheron, tandis que ma mère restait au foyer.

J’y reçus une éducation dans la petite école du village, me faisant par la même occasion de bons amis, me permettant ainsi de m’épanouir pleinement. C’est ainsi que mon caractère quelque peu différent des Hyou normaux se développa, comme pour la plupart des autres enfants venant de là-bas. Aussi, je ne faisais pas qu’étudier. Je m’entraînais aussi énormément, privilégiant ma souplesse et ma vitesse à la force. Je trouvais mieux d’esquiver les attaques ennemies rapidement et de les rendre sans qu’il n’ait le temps de dire ouf. Il n’y a pas à se demander pourquoi je jouais aussi bien avec des garçons qu’avec des filles, dans ce cas-là…

Le temps s’écoulait, telle une histoire ordinaire. Je jouais, je me battais, je me disputais et je me réconciliais avec mes amis, bref. Ma vie était banale. A la seule exception près que nous avions l’interdiction d’aller dans la forêt non loin du bourg, étant ‘trop dangereuse’ d’après les adultes. En fait, je n’y serais justement jamais allée si on ne m’avait pas dit cela. Au début, je parvenais à me retenir, à ne pas y aller. Mais lorsqu’un jour je vis une étrange fumée remontait depuis ces bois, je craquais. La curiosité et l’intrépidité, en plus de ma fâcheuse tendance à désobéir aux ordres, me poussèrent à m’y rendre. Seule, pour combler le tout. Mais que voulez-vous ? J’étais une enfant, inconscient des dangers que je pourrais y trouver. Seulement…ce n’était pas un danger que je finis par y trouver. Plutôt une petite fille, en pleure. Elle semblait totalement perdue, écroulée, déprimée. Elle paraissait totalement détruite. Puis c’est là que mon Don s’activa pour la première fois. C’était comme dans un rêve éveillé, je ne contrôlais plus mon corps. Ni mes paroles. Et un flot de souvenirs envahit ma mémoire, et je compris bien vite que c’était les souvenirs de cette petite fille. Alice. C’était son prénom. Alors, mon Don me poussa à la consoler, en la faisant également rire, en lui remontant le moral. Puis, lorsque j’eus l’étrange impression que j’en eus assez fait de ce côté-là, je me mis à flotter dans les airs, puis à disparaître, pour réapparaître derrière un arbre au tronc épais, ne laissant voir que ma tête. Alice, ne voulant sûrement pas se retrouver seule, me suivit. Et je recommençai, encore et encore, jusqu’à l’arrivée de la nuit. Jusqu’à ce que je l’eus menée au village. C’est là que je compris à quel point je m’étais éloignée, et à quel point on s’était inquiété pour moi. Tous les villageois me cherchait, m’appeler. Seulement, je n’avais pas été capable de les entendre pendant que mon Don était actif. En effet, celui-ci s’était momentanément volatilisé au moment même où mes parents m’avaient retrouvé, au moment où Alice était entrée dans le bourg, à ma suite.

Puis le village adopta Alice, qui leur expliqua que sa maison, cachée aux confins de la forêt, avait brûlée, ses parents avec. Cela expliquait d’ailleurs l’étrange fumée qui s’était dégagée des bois. Puis elle fut recueillit par une vieille dame du bourg, qui était extrêmement gentille. La petite fille continuait de venir me voir, de me rendre visite. Et nous devînmes meilleures amies. Quant à mon Don, il ne se manifesta plus, bien qu’en racontant mon aventure à ma mère, elle m’expliqua qu’il ne devait sûrement s’activer que lorsque je voyais le malheur d’une personne.

Et, des années plus tard, mon père tomba malade. On tenta de le guérir, on fit venir les meilleurs médecins du village. Aucun ne parvinrent à le guérir. Ils réussirent juste à lui permettre de ne plus sentir la douleur. Et il mourra ainsi plus paisiblement.

Ce ne fut pourtant pas ce qui réussit à me consoler. Ni même ma mère, d’ailleurs. Sans compter que maintenant, notre maison ne bénéficiait plus d’aucunes sources de revenus. Et c’est là que mon Don s’activa pour la deuxième fois, pour consoler ma mère. Ce fut long, cela prit des mois. Des mois qui passait pendant qu’elle devait travailler en tant que serveuse dans le café du village, où j’étais incapable de m’éloigner d’elle, malgré moi. Mais cela finit par l’aider, par lui faire remonter la pente. Elle recommençait à sourire, et revoir ses amies. D’ailleurs, en y repensant, je crois que c’est le fait d’avoir eu l’impression de vivre un rêve, que je ne fus pas si affectée que cela par la mort de mon père. Du moins, je n’en eus pas le temps. Et finalement, ma mère finit par réellement mieux se sentir, et mon Don s’en alla, tout simplement. Tout comme la première fois.

Et les années passèrent, une fois de plus. La pauvreté était plus que présente dans la maison, nous manquions de beaucoup de choses. Alors, à mes dix-sept ans, je pris une décision. Celle d’aller au Pensionnat Phoebe, pour soutenir financièrement ma mère. Cette dernière s’y opposa d’abord, tout comme Alice et d’autres amis. Mais, à force d’arguments, de lui dire que cela me serait tout aussi profitable, ils finirent tous par céder. Et je me préparai alors à rejoindre ce lieu, que j’espérais m’être bénéfique.